Qui ne connait pas Jacques-Yves Le Toumelin ?
L'ultime voyage de Jacques-Yves Le Toumelin
Jacques-Yves Le Toumelin avait tout Platon dans le Kurun : symbole d'une navigation libre et recherche spirituelle à la fois. : Archives
Le navigateur avait réalisé un tour du monde à la voile, entre 1949 et 1952, à partir du Croisic, inspirant toute une génération. Installé à La Turballe, l'homme s'est éteint à l'âge de 89 ans.
Nécrologie
Le circumnavigateur, installé depuis 35 ans à La Turballe, dans une maison au bord de l'eau avec sa femme, est décédé en début de semaine. Jacques-Yves Le Toumelin a été enterré hier vendredi, dans l'après-midi, au cimetière de La Turballe, dans la plus stricte intimité.
Le vieil homme avait rangé son sextant depuis bien longtemps et s'était isolé, loin de la fureur du monde moderne. Passant du voyage autour des mers au voyage intérieur : l'amoureux des peuples d'Océanie s'était mis à tout lire sur la spiritualité, dont René Guénon.
Il y a deux mois, l'autodidacte narrait son départ, 60 ans plus tôt, pour le tour du monde. « Le 19 septembre 1949, il n'y avait personne quand je suis parti, à part mon père et l'armateur Bihoré ». Ce jour-là, Jacques-Yves Le Toumelin quitte discrètement Le Croisic pour une circumnavigation. Le retour en 1952 sera triomphal. Une légende est née. Ce long périple sur les mers du monde fera de lui un navigateur hors normes, dans la lignée des Joshua Slocum, au siècle précédent et d'Alain Gerbault. Un autodidacte dont le livre « Kurun autour du monde » sera un best-seller, inspirant Bernard Moitessier et de nombreux circumnavigateurs.
Le navigateur de 29 ans fait construire, au Croisic, le Kurun (tonnerre, en breton), un cotre norvégien de 10 m très ventru de coque.
Sagesse orientale
Après un retour triomphal le 7 juillet 1952, il effectue un deuxième voyage aux Antilles, en 1953-1954, notamment dans l'île Dominique où il découvre la dernière réserve d'Indiens caraïbes.
Il avait prévu un troisième voyage en Inde, vers les racines de la Sagesse, mais la construction d'une maison voici 35 ans, en face du Traict du Croisic, sur le sable, l'accapare. Il s'y installe avec son épouse Josée et leurs trois enfants.
Sa soeur Yhane, mariée à Jean-François Revel, est adepte du bouddhisme tibétain, son épouse aussi. Jacques-Yves se rapproche de la sagesse orientale et invite, dans sa maison, des maîtres tibétains, recherchant la méditation. Son neveu, Matthieu Ricard, est le traducteur du Dalaï-Lama. Après la découverte du monde physique, le voyage intérieur l'a ramené à lui-même. Sage. Il s'est éteint comme il le souhaitait, chez lui, entouré des siens.
Michel ORIOT.
Ouest-France