A lire dans Ouest France.
Le capitaine du 3 mâts géant n'a que 32 ans
C'est le plus gros des bateaux de la semaine du Golfe. L'Oosterschelde est commandé par un jeune capitaine. Il nous a offert hier les honneurs du bord. Bois, cuivres et parfum d'aventure.
Sa silhouette magnifique est apparue dimanche soir dans le Golfe, après six jours de traversée éprouvante, depuis Ostende (Belgique). Affrontant des vents contraires de 35 à 40 noeuds, des paquets de mer, l'Oosteschelde est enfin entré dans la Petite mer.
Il est là, immobile et majestueux, baignant les eaux turquoises du Golfe. Impressionnant comme un géant en pleine sieste. En haut de l'échelle de coupée ce n'est pas un vieux loup de mer barbu au cuir tanné qui nous attend : Martin, seul maître après Dieu de l'Oosterschelde, n'a que 32 ans. Il vous accueille dans le sourire propre aux hommes heureux. Et un paquetage déjà impressionnant : Martin navigue depuis l'âge de 20 ans, et est déjà passé par l'Antarctique, New York, Saint-Petersbourg et Osaka.
« Ma rencontre avec l'Oosterschelde remonte à 1997, à Hong Kong. J'ai eu un coup de foudre, raconte Martin Thomsen, qui parle de ce trois mâts de 50 mètres de long comme d'une conquête féminine. Un amour tel qu'il va accepter, au départ, d'embarquer sans solde : « commander n'était pas mon but, je voulais seulement naviguer à travers le monde. J'ai commencé à bord comme bénévole, puis premier sur le pont, premier maître. Et un jour capitaine. »
Sur le pont baigné de soleil, aux boiseries chaudes, balayé par les vents, trois marins tout aussi jeunes que le capitaine Thomsen briquent le pont. C'est le métier qui rentre. Le premier maître Anthony raconte qu'à l'arrivée à l'île-aux-Moines « les conditions météo étaient tellement éprouvantes qu'on a débouché du champagne en arrivant. Nous étions tellement lessivés qu'ensuite, on s'est tous couchés ». Pas de sexisme à bord, l'équipage de cinq marins seulement accueille aussi une femme, Astrid, 34 ans, qui a déjà bourlingué « dans une dizaine de bateaux différents ».
Un Seigneur de 300 tonnes
Dans les entrailles de l'Oosterschelde, l'ambiance vous transporte dans un pub irlandais : banquettes de cuir, piano « pour les grandes occasions », cuivres, cloche, vieux poêle en fonte et tableaux marins. Dont la photo du trois mats en 1918. « 352 bateaux comme l'Oosterschelde ont été construits. il est le seul survivant ».
Ce seigneur des mers de 300 tonnes, aux flancs d'acier, a transporté de la farine, du charbon. Avant sa restauration en 1990, il ne ressemblait plus qu'à un caboteur banal. Deux ans plus tard, en 1992, et un coup de génie, il est devenu la plus grande goélette des Pays-Bas.
Fi de la farine et du charbon, ce sont des passagers qu'il embarque désormais, « jusqu'à 100 personnes pour la journée, ou 24 personnes en cabine ». Des passagers fuyant un monde stressant, en quête d'aventures maritimes sur un océan de liberté. L'Oosterschelde arrête le temps et se joue des frontières. Son métier ? Faire rêver les hommes.
Eric de GRANDMAISON.
Ouest-France
Bon vent à tous ceux qui embarquent dimanche.
Lolotte